Au passage de frontière de Cyanika, le temps s'éclaircit et nous pouvons enfin apercevoir la chaîne de volcans transfrontalière Congo-Rwanda-Ouganda qui se cachait de nous depuis 2 jours.
Vue sur la chaîne des volcans rwandais et ougandais et sur le lac Bunyonyi
La première ville d'importance que nous traversons est Kisoro, base touristique pour aller traquer les gorilles des montagnes. Bien que les tarifs pour aller voir ces primates soient beaucoup moins coûteux en Ouganda qu'au Rwanda (600$ contre 1'500$), nous n'avons pas prévu d'y aller. Nous ne restons donc à Kisoro que le temps d'acheter une carte sim, un forfait Internet et de retirer des shillings ; la ville est vraiment très moche. Nous prenons ensuite la route en direction de Kabale et nous arrêtons pour bivouaquer en fin d'après-midi à 2450 mètres d'altitude en bordure de la réserve forestière d'Echya au-dessus du lac Bunyoni. Nous sommes surpris par la pauvreté des gens qui habitent dans cette montagne, par la vétusté des habitations. Dans cette région, vit le peuple Batwa (ou pygmée) l'un des plus pauvres et des plus discriminés d'Ouganda. Il est possible que ce soit eux que nous ayons croisés aujourd'hui.
Lors de ce premier bivouac sauvage, tout se passe bien. Nous ne sommes pas dérangés et ne sentons aucune insécurité. Nous repartons tôt le matin pour nous rendre aux chutes de Kisiizi. Nous faisons quelques kilomètres sur la belle route asphaltée Kisoro-Kabale puis nous empruntons une piste conseillée par notre GPS. On roule pendant des kilomètres en suivant une trace qui se réduit de plus en plus. Il est bientôt impossible de croiser ; heureusement, nous ne rencontrons presque aucun véhicule, à part une ou deux motos. En plus d'être étroite, la route est escarpée, à flanc de falaise et évoluant à plus de 2000 mètres d'altitude. Au bout d'une heure environ, nous rejoignons une belle piste qui, nous le comprenons, aurait pu nous emmener jusqu'ici dans de meilleures conditions. Nous la croisons pour continuer par un petit chemin descendant très cabossé. C'est alors que je prends peur et que nous décidons de faire demi-tour, de revenir à notre point de départ par la belle piste et de rejoindre Kabale puis Rubaru où nous reprenons une piste mieux indiquée et un peu meilleure que la première. Cela nous fait faire un grand détour mais cela me rassure. Cela nous permet aussi de faire un arrêt dans un petit resto à la sortie de Kabale.
Vers les chutes de Kisiizi, des détours...
... encore des détours...
... et des rencontres
Les Kisiizi Falls ne méritent peut-être pas, à elles-seules, le temps que l'on a passé pour les rejoindre mais leur histoire tragique et le beau monument qui l'illustre vaut le détour. Il y a plusieurs années, les filles-mères étaient jetées du haut des chutes par punition et c'était souvent un frère qui était contraint de les pousser...
Kisiizi Falls
Quant au village lui-même, c'est un petit village perdu dans la montagne mais qui dispose quand même d'un hôpital. La sage-femme, une Hollandaise, que nous rencontrons sur le site des chutes nous conseille de nous installer dans la cour de l'établissement pour la nuit afin de ne pas être importunés. Notre véhicule qui est quelquefois pris pour une ambulance passe inaperçu sur ce parking.
Les petits commerces de Kisiizi
Elle nous conseille également sur le choix de la route du lendemain pour rejoindre la forêt de Kalinzu en bordure du parc national Queen Elisabeth. Nous suivons ses indications mais, la piste n'est quand même pas terrible. Nous sommes contents d'arriver enfin à Kebisoni, le village où nous retrouvons une belle route asphaltée que nous suivons jusqu'à Ishaka. Ensuite, cette même route très dégradée mais en réfection se poursuit jusqu'à l'entrée de la Kalinzu Forest à travers les bananeraies, les plaines de papyrus puis les plantations de thé. Nous nous arrêtons au bureau du parc qui dispose d'un camping sommaire et réservons, pour le lendemain, une randonnée pour traquer les chimpanzés qui peuplent cette forêt. En attendant les chimpanzés, nous guettons les babouins qui tournent autour de notre véhicule, toujours prêts à chiper quelque chose.
Vers 7h30 le lendemain, nous partons accompagnés d'un guide et d'une touriste allemande sur les sentiers forestiers. D'autres groupes s'apprêtent à partir également. Au bout de quelques minutes de balade, nous apercevons un singe bleu puis, non loin, un chimpanzé haut perché dans un arbre. La traque débute bien. Un peu plus loin, nous croisons des colobes noirs et blancs puis un singe ascagne ou à queue rouge. La traque n'est pas de tout repos et la forêt est tellement dense qu'il n'est ni facile d'apercevoir ni de photographier les animaux. Nous tournons ensuite plusieurs heures sans rien voir jusqu'à ce qu'un autre guide nous indique par téléphone le lieu où se trouve un groupe de 10 chimpanzés. Le temps que nous arrivions sur place, il n'y en a plus que 2, les femelles et les petits apeurés par les touristes sont partis. En conclusion de ces 5 heures de traque, on se dit que l'on aurait aimé voir d'avantage de chimpanzés mais que la forêt de Kalinzu n'est pas un zoo dont les animaux sont trop "familiarisés" avec les humains et que c'est bien ainsi. De plus cela nous a permis de faire un peu d'exercice.
Canal entre les lacs Edward et George - Katunguru
Nous repassons une nuit dans la Kalinzu Forest avant de rejoindre, plus au nord, Katunguru et une des entrée du parc national Queen Elizabeth en continuant la même mauvaise route pleine de trous (toujours en cours de réhabilitation) que nous avions prise pour arriver jusque-là.
Lac de cratère Nyamanyuka - Katwe Explosion Crater Field - parc national Queen Elizabeth
On peut traverser le parc national Queen Elizabeth de Katunguru vers Katwe (est - ouest) ou de Katunguru vers Ishasha (nord-sud) sans payer de droit de passage ou bien visiter les portions payantes d'Ishasha (lions arboricoles), Kyambura (chimpanzés), Katwe (cratères de volcans endormis) et Kasenyi et Mweya (faune sauvage, du lion à l'éléphant). Le droit d'entrée est valable 24h.
Avant de prendre la direction d'Ishasha pour aller voir les lions, nous faisons un détour jusqu'au village de Katwe au bord du lac Edward. Le long de la route, nous croisons plusieurs troupeaux de buffles et de cobes. Au bord du lac, peu avant Katwe, nous apercevons une harde d'une cinquantaine d'éléphants se désaltérant. En escaladant le talus, on s'approche d'eux et l'on voit qu'il n'y a pas que des pachydermes mais aussi des dizaines d'hippos et des crocos. Nous restons sur place pour pique-niquer lorsque d'autres éléphants approchent. Comme nous sommes sur leur chemin, nous nous déplaçons pour ne pas risquer de se faire chahuter mais il semble bien qu'ils nous ignorent.
Eléphants, buffles, hippos et cobes, la faune en liberté - Katwe au bord du lac Edward
Pique-nique en compagnie des éléphants - Katwe au bord du lac Edward
Le parc Queen Elisabeth n'est pas clôturé ce qui explique que l'on voit la faune sauvage partout, même sur la route principale. Au retour vers Katunguru, des éléphants traversent devant notre véhicule et lorsque nous arrivons au camp communautaire de Kisenyi, le Kisenyi Lake Retreat, pour passer la nuit entre Katunguru et Ishasha, d'autres éléphants nous y attendent encore. Dans la nuit, nous entendons le grognement d'un hippo et au petit matin des cobes et des grues gambadent autour de notre véhicule. On se demande bien ce que l'on peut voir de plus dans les réserves du parc !
Superbe bivouac dans le camp de la communauté de Kisenyi au bord du lac Edward
Cobes, grues, la faune au réveil - Kisenyi
A midi, nous entrons dans la réserve d'Ishasha à la recherche des lions arboricoles, des lions qui grimpent dans les arbres, particularité rare chez ces fauves. Alors que nous avions vu une multitude d'animaux la veille, nous sommes surpris d'en voir si peu ici. Il y a bien quelques antilopes, des topis mais pas grand-chose d'autre. De plus, la piste qui sillonne le parc est un cauchemar ; elle est étroite et en très mauvais état. Difficile de se concentrer sur les animaux et les paysages, on ne pense qu'à regarder la route.
En milieu d'après-midi, nous apercevons enfin 4 lions. S'ils sont bien sur un arbre, ce n'est pas un figuier comme on s'y attendait mais un arbre mort. Nous avons à peine le temps de les voir qu'un orage éclate ; on se décide alors à rentrer. Nous voulons être ce soir à Katunguru et pour cela nous devons d'abord rejoindre la porte de Katookye au nord d'Ishasha puis reprendre la piste principale de 75 km. Nous en avons pour 3 ou 4 heures de pistes, de très mauvaises pistes. Heureusement que la nuit ne tombe pas avant 19 heures.
Topis - Ishasha - Queen Elizabeth NP
Cobes d'Ouganda - Queen Elizabeth NP
En chemin, tout près de Kisenyi, nous prenons le temps de photographier des colobes noirs et blancs. Leurs longs poils sur le dos et au bout de leur queue est une caractéristique qui ne nous laisse jamais indifférents.
Colobes noirs et blancs sur la route de Kisenyi
A 18h45, nous sommes à Katunguru comme nous l'avions prévu, au camp Tembo Safari Lodge situé au-dessus du canal Kasinga reliant les lacs Edward et George. Quelle journée ! 160 km de pistes en mauvais état ; bravo au chauffeur qui a gardé son calme. Quant à moi, ce genre de pistes m'épuise.
Le lendemain, ce n'est pas fini ; notre entrée étant encore valable jusqu'à midi, il nous reste 5 heures pour visiter une autre partie du parc. Nous nous rendons dans la partie nord-est qui jouxte le lac George, Kasenyi. Ici, la piste est meilleure mais, il y a très peu d'animaux. Un seul éléphant aperçu contre une dizaine ce matin avant l'entrée. Quelques buffles, de nombreux hippos dans le lac et 4 lions aperçus aux jumelles. L'endroit est un peu décevant. Cela confirme notre impression, il y a d'avantage d'animaux à voir en dehors des réserves qu'à l'intérieur. A posteriori, on se demande si cela vaut bien le coup de payer l'entrée.
Hippos et martins-pêcheurs dans le lac George - plaines de Kasenyi - Queen Elizabeth NP
Peut-être pour la vue sur les cratères de Katwe, la dernière partie que nous traversons, qui est époustouflante. Nous rentrons sur la zone des cratères un peu avant midi. Notre billet n'étant valable qu'une heure, nous convenons avec la gardienne que nous irons jusqu'au premier point-de-vue puis que nous ferons demi-tour. Cependant, à mesure que nous avançons, nous nous apercevons qu'il sera impossible de faire demi-tour. Le chemin est très escarpé (nous suivons les crêtes des cratères) et on ne peut croiser car la piste et étroite et les bas-côtés profonds. Nous n'avons qu'une solution continuer. Comme nous ne voulons pas risquer de repayer un jour de plus, nous redescendons par un petit chemin débouchant sur la piste de Katwe que nous avions repéré 2 jours avant et qui ne possède pas de porte officielle. C'est un peu périlleux de ne pas suivre le chemin recommandé mais, on tente le coup et finalement, à part les centaines de mouches tsé-tsé qui veulent rentrer dans le véhicule pour nous piquer, l'option s'avère être la bonne.
Cratère Kyemengo - Katwe Explosion Crater Field - parc national Queen Elizabeth
Lac de cratère Murumuli - Katwe Explosion Crater Field - parc national Queen Elizabeth
L'Ouganda, situé sur le rift est-africain (une faille de plusieurs milliers de kilomètres allant de la mer Rouge jusqu'au sud du Mozambique) est parsemé de volcans et de lacs. Après avoir franchi la ligne de l'Equateur en sortant du parc Queen Elisabeth, nous allons visiter une autre région de cratères, celle de Kyatwa entre Kasese et Port Portal. Pour y aller, nous continuons la route Katunguru-Rwimi pendant environ 100 km (avec un arrêt à Kasese, dans un petit resto bien tenu où nous mangeons un très bon menu pour presque rien puis nous prenons un sentier qui s'enfonce peu à peu dans les plantations de bananes et de thé puis dans la forêt vierge et qui arrive au Planet Ruigo Lodge, un camp situé au bord du lac de cratère de Kasenda. Un endroit idyllique.
Piste Rwimi - Kasenda
On peut s'y baigner, s'y balader sur les crêtes des volcans ou dans la forêt mais on peut aussi apercevoir facilement des colobes noirs et blancs, des colobes à tête rouge, des vervets et des singes ascagnes.
Singes colobes et vervets - Lac Kasenda
Nous y faisons escale 2 jours avant de rejoindre un autre lac de cratère, celui de Nkuruba où nous séjournons au camp communautaire. Ici, l'atmosphère est un peu différente. L'endroit est plus fréquenté avec une ambiance "backpacker". On y croise toutes les nationalités, Israéliens, Belges, Espagnols, Français, etc... Certains sont en famille, d'autres sont des "touristes-volontaires", un concept très en vogue partout dans le monde qui permet d'aider les populations défavorisées pendant ses vacances.
Piste Kasenda - Lac Nkuruba
Balade dans les bananeraies - Lac Nkuruba
En balade au bord du lac Nkuruba et dans le camp même, nous retrouvons les mêmes singes qu'à Kasenda, colobes et vervets, toujours aussi nombreux. En Ouganda, nous avons maintes fois aperçu des colobes noirs et blancs en pleine nature et dire qu'au Rwanda, au parc national Nyungwe, il fallait prendre un guide pour les voir et payer 70$ par personne...
Nous ne passons qu'une journée au bord du lac Nkuruba puis nous partons à Fort Portal. Nous y faisons quelques courses, du pain, des fruits... il n'y a pas grand-chose dans les petites échoppes en Ouganda. Heureusement que nous avons fait de grosses provisions au Rwanda et que nous mangeons souvent au restaurant. Les plats dans les lodges ou bien dans les petits restaurants que nous fréquentons sont bons, toujours complets (viande ou poisson, légumes et féculents). On est servi en quantité et cela coûte très peu cher, de 5'000 à 15'000 Ush, soit de 1.20€ à 4€.
Route Fort Portal - Kampala, la campagne
Après Fort Portal, nous avions prévu de monter plus au nord jusqu'au lac Albert sans grande motivation cependant. En principe, si l'on prend cette direction, c'est pour rejoindre ensuite le parc national de Murchinson Falls or nous n'avons aucune envie de refaire un safari dans ce parc. Au réveil, on retrouve un peu d'intérêt pour cette destination et l'on se met en route pour Hoima puis le lac Albert. Pendant 50 km, jusqu'au village de Kyenjojo, on suit une belle route qui traverse les plantations de thé et quelques forêt comme celle de Masindi puis à partir de là, on s'engage sur une piste. La piste est mauvaise et jusqu'au lac, il y a 170 km. Au bout de 10 km, on décide de faire demi-tour ; on n'a pas envie de se faire chahuter toute la journée pour rien. On reprend alors la route en direction de Kampala, la capitale, en comptant s'arrêter bien avant afin de faire la route en 2 étapes.
Route Fort Portal - Kampala, la ville
Pourtant, on a beau chercher, faire des détours, des allers-retours par des pistes menant à d'introuvables camps, il n'y a aucun endroit plaisant où s'arrêter et on se retrouve à 17h30 dans la capitale, en pleine heure de pointe. Nous mettons 3 heures pour arriver au red Chilli Hotel, un lodge trouvé sur l'appli Ioverlander et situé à la sortie de la ville, non loin du lac Victoria. Pour y parvenir, nous traversons la moitié de la ville de nuit ce qui est assez difficile même si, heureusement, la chaussée est en bon état. On a du mal à se faire une idée de cette ville mais elle nous semble assez moderne et bien entretenue. On traverse des quartiers populaires animés avec de nombreuses échoppes, des vendeurs de fruits et légumes, des restaurants, des bars mais aussi des quartiers plus chics avec des centres commerciaux luxueux.
Alors que nous nous apprêtons à partir, la belle piscine de l'hôtel et le soleil nous décide à rester une journée supplémentaire au Red Chilli de Kampala. Journée repos bien méritée après les 350 km de route de la veille.
Le lendemain, pour quitter Kampala, nous mettons autant de temps que pour y entrer et presque 4 heures pour arriver jusqu'à la ville de Jinja située à seulement 85 km ; la route est encombrée de camions se dirigeant vers la frontière kenyane. Nous perdons aussi du temps dans un supermarché Shoprite où il y a toutes les marchandises que l'on peut espérer (on se croirait en Afrique du Sud) et où l'on fait quelques réserves.
La ville de Jinja se trouve au bord du lac Victoria. C'est une ville à l'ambiance un peu différente des autres villes ougandaises où les anciens bâtiments coloniaux jouxtent les boutiques des marchands indo-pakistanais.
C'est à Jinja que le Nil prend sa source. Il s'agit en réalité du Nil Blanc, l'affluent le plus lointain du Nil découvert en 1862 par l'explorateur anglais Speke. Il y a également le Nil Bleu qui débute en Ethiopie. Le Nil Blanc et le Nil Bleu se rejoignent ensuite pour former le Nil. Dans 6'700 km, le Nil se jettera dans la Méditerranée. A partir de maintenant, nous suivrons, de plus ou moins près, son cours pour remonter l'Afrique.
Nous restons 2 jours au "Source of The Nile", un bel endroit qui surplombe le lac et le Nil, avant de nous approcher de la frontière kenyane de Busia. Nous faisons une dernière pause dans un hôtel en bord de route à Bugiri avant de sortir du pays.
L'Ouganda
Un beau pays à visiter, à la fois authentique et touristiquement attrayant. Un pays où l'activité humaine n'a pas encore défiguré les paysages et où la population est accueillante et bienveillante. Si les gens ont l'habitude de nous réclamer quelque chose, c'est toujours avec le sourire même si nous leur refusons ; ce que nous faisons la plupart du temps.